Mecanissimo !

Rédigé par Mozart-est-là

Êtes-vous de ceux qui conspuent la technologie et trouvent les logiciels d’édition de partition fort peu ergonomiques ? C’est votre droit ! Mais, sachez que contrairement à une idée largement répandue, nous ne sommes pas passés de la plume à l’ordinateur de façon spontanée et immédiate...

Vous en doutez ? C'est encore votre droit ! Mais pas question pour autant de nous perdre dans un débat entre darwinistes et créationnistes de la calligraphie musicale. La simple évocation de machines oubliées et pourtant, largement utilisées dans le monde de l’édition musicale durant le 20e siècle, devrait remettre les pendules à l’heure…

Je vous invite à faire un petit voyage dans le passé, à l’époque où les fabricants de machines à écrire se sont penchés sur la question de l’écriture de la musique. Oui, la musique a aussi connu son heure de mécanisation avec, entre autres, la Musicwriter qui a connu un certain succès dans les années 60 et a été largement utilisée jusqu'au début des années 90.

La Musicwriter est loin d’être la première machine à écrire la musique. Depuis le 19e siècle, de nombreuses inventions ont vu le jour avec plus ou moins de bonheur. Dès les années 40, par exemple, la machine de Keaton a commencé à bouleverser l’édition musicale dans un monde professionnel pourtant encore dominé par la gravure sur plaque.

On peut légitimement se poser la question de l’influence de ce mode d’écriture sur la liberté du compositeur. Le mécanisme forcément simplifié de ces outils, aussi ingénieux fussent-ils, a forcément réduit la latitude des compositeurs dans leurs choix expressifs. Les machines à écrire la musique ont été pensées et conçues pour écrire la musique de façon rigoureuse et classique. Tout écart d’un compositeur aux règles établies obligeait l’imprimeur à retoucher la partition en aval de sa sortie machine.

Cette limitation intrinsèque des machines à écrire la musique a été un frein certain à leur utilisation dans un 20e siècle avide de ruptures des conventions.

La liberté totale de la graphie musicale, qui était l’apanage de l’écriture manuelle et par extension de la gravure, n’a été retrouvée qu’avec l’ordinateur et les logiciels puissants qui permettent absolument toute digression voulue par le compositeur.

Les dernières générations de logiciels comme Staff Pad font la jonction entre les 2 mondes. Ils convertissent à la volée la saisie des notes écrites au stylet sur un écran tactile.

Mais l’évolution ne s’arrêtera certainement pas là. On peut entrevoir l’utilisation de l’intelligence artificielle qui permettra de comprendre la musique. Il est probable que dans quelques années, un ordinateur pourra retranscrire à la perfection la partition d’une symphonie de Beethoven… en l’écoutant !

La question qui se pose est bien sûr : êtes-vous prêts à déposer la plume ? Pour moi, la réponse est clairement non ! Après tout, l’apparition de l’automobile et du train n’a pas empêché les gens de marcher… bien au contraire.

 

Sur le sujet :

Les logiciels d’édition de partitions

Ressources externes :

Music Printing History - Un historique exhaustif. Vraiment complet et passionnant, mais en anglais seulement .

La gravure chez Henle Verlag - Une vidéo qui montre les étapes de la gravure sur plaque qui est toujours pratiquée pour certaines éditions de luxe.